Ça fait déjà 4 mois que ça dure. 4 mois que j’entre dans cette même chambre d’hôtel avec une fréquence de 4 soirs sur 7. Toujours le soir, jamais la journée. Aujourd’hui ne fait pas exception.

Je passe les portes battantes de l’entrée du bâtiment ; vais chercher la même clé qu’à chaque fois, la numéro 333 ; je prends les escaliers menant au 3ème étage puis je travers le couloir sombre à la moquette rouge sang ; j’arrive devant la porte, mets la clé dans la serrure, la tourne deux fois vers la droite puis ouvre ; j’entre, referme la porte derrière moi en laissant la clé dessus ; je ferme les simples rideaux des fenêtres ; vais m’assoir sur le lit…et attends.

Tout ça, c’est lui qui m’a demandé de le faire. Et ça fait 4 mois que j’agis ainsi, y prenant plaisir. Comme prévu, il est 21h30 lorsque je m’assois. Et comme d’habitude, la porte s’ouvre à 22h tapante, faisant apparaitre un mince filet de lumière qui s’étend sur les couvertures du lit et le mur blanc. J’entends le verrou tourner et j’ai un frisson. L’attente y est pour beaucoup aussi. Parce que je sais que ce qu’il va me faire ce soir me donnera un plaisir incommensurable, comme personne ne m’en donnera jamais.

Des pas calfeutrés…une respiration calme comparée à la mienne qui s’emballe…une main douce, chaude, fine et ferme qui se pose sur mon épaule…je n’ai jamais vu son visage.
On s’est rencontrés sur Internet, un site où on dévoilait quelques uns de nos plus profonds secrets. Il aime dominer, j’aime être soumis…On s’est trouvés. L’idée d’une telle mise en scène m’avait bien émoustillé, moi qui suis pourtant si novice en la matière. Complètement taré…c’était ce que je me disais sur moi-même après avoir accepté son offre et passé pour la première fois une nuit dans cette chambre d’hôtel. Et ça avait continué…

- Sho.

Rien que le fait de l’entendre prononcer mon prénom dresse mon épiderme et je ferme les yeux. L’habituel foulard glisse sur mes paupières, mes tempes et s’attache derrière ma tête. Voilà, je ne vois plus rien. Ses mains descendent doucement, s’attardent sur ma nuque et mes épaules. Il me fait un massage qui me détend et, il le sait, me donne encore plus envie de voir ce qu’il me réserve pour la suite. Je le sens passer devant moi, son visage est tout prêt du mien, son souffle balaye mon visage.

J’ai envie de l’embrasser.

Je ne le ferai pas.

Ce n’est pas le moment, il ne le veut pas encore. Pas maintenant.

Il écarte la mèche de mon front et l’embrasse doucement. A genoux, je reste les bras ballants, sans bouger. Sans même presque respirer. Je sens pleinement sa présence, dangereuse pour moi mais si attirante.

« Embrasse-moi »  « Embrasse-moi » « Embrasse-moi… »

Ses lèvres frôlent les miennes, j’ouvre un peu la bouche…mais rien. Toujours rien. Et le pire c’est que je sais que ça se passera comme ça.

Il caresse doucement mon torse par-dessus ma chemise, puis par-dessous, la bouche toujours à quelques millimètres de la mienne. Je frissonne, j’ai chaud…il me rend dingue. Comment est-ce possible ? Comment fait-il ? Je me le demande toujours.

Ses doigts se faufilent sur mon torse, jouent avec mes zones sensibles, mes tétons, me faisant déjà soupirer de bien-être. Je sens alors une pression vers mes aisselles et je lève les bras au-dessus de ma tête, comme un automate.

Mon haut a disparu. Je suis torse nu.

Mes bras, eux, retombent le long de mon corps. Ses mains passent dans mon dos, glissent tout le long, appuient sur le bas de mes reins et passent dans mon pantalon. Il agrippe soudainement mes fesses et les malaxe avec force et vigueur, me faisant gémir. Il continue ainsi de longues minutes durant, me donnant l’impression que je vais exploser d’une seconde à l’autre. C’est qu’il sait y faire…

Il déboutonne à présent mon pantalon. Lentement, sans se précipiter. J’ai envie qu’il me l’arrache, mais il ne le fera pas. Il prend son temps, comme toujours. Très méthodique, très précis. Il me frôle, ne me touche pas. Le dos de sa main caresse mon nombril. Une fois ma braguette dé zippée, il glisse à nouveau les mains dans mon pantalon et descend sur mes cuisses. Je me relève un peu et le vêtement glisse sur mes jambes en même temps que ses doigts fins et brûlants.

Ou alors est-ce ma peau qui bouillonne ?

J’entends mon pantalon tomber au sol dans un bruit sourd et je suis sûr qu’il sourit. Je le sens au plus profond de moi. Et je sais pourquoi.

Son index, ou ce que je crois être son index, frôle le string que je porte.

Non il ne faut pas croire, je ne porte pas ça tout le temps. Juste quand il me le demande. Et il faut avouer qu’en ce moment, ça arrive de plus en plus souvent. Je m’y suis habitué, à ce bout de coton qui me rentre entre les fesses. Et puis c’est excitant parfois. Quand je marche, j’ai l’impression d’être nu sous mon pantalon.

Je dois être un tableau étonnant à voir tout de même. Assis à genoux sur un lit, vêtu simplement d’un string rouge et les yeux bandés par un foulard de couleur similaire.
Il me caresse légèrement par-dessus le fin tissu et je gémis d’appréhension. Mes mains cherchent son corps, ses épaules mais ne reçoivent en retour qu’une claque sévère.

Je n’ai pas le droit de le toucher. Depuis le début je ne l’ai touché qu’à un seul endroit, le seul permis et que si j’ai l’autorisation. Sinon rien. Je me demande pourquoi. J’ai envie à chaque fois d’explorer son corps, de le couvrir de caresses et de baisers brûlants, de l’embrasser à en perdre mon souffle…

Mais non. C’est la règle du jeu. Et ça me va amplement.

C’est lui qui commande.

Je le sais. Il le sait.

Il s’écarte de moi brusquement et j’entends des vêtements se froisser. Il descend du lit, puis remonte. Je ne bouge pas. Je ne parle pas.

Je sursaute un peu quand il s’agrippe soudainement à mes épaules et un long frisson parcoure mon échine lorsque je me rends compte qu’il est nu. Totalement nu. Ça m’excite à un point…inimaginable. Mon string ne me contiendra bientôt plus. Je suis parfois sûr qu’avec rien qu’un seul mot, il pourrait me faire jouir. Cet homme est un magicien.

Un magicien sans voix. Il ne parle presque jamais. Ça aussi, je ne sais pas pourquoi. Il me parlait un peu le premier mois pour me donner des ordres. Mais maintenant je n’en ai plus besoin. Je le comprends sans mot. Je sais ce qu’il veut. Il sait ce que je veux. Jamais personne n’a autant compris ce qui me faisait plaisir, même moi. C’est fou non ?

Ses doigts se faufilent dans mes cheveux, s’accrochent à ma nuque et je penche la tête en arrière pour qu’il vienne dévorer mon cou. Je soupire alors qu’il mordille ma clavicule, suçote ma peau et mord mon oreille, m’arrachant des gémissements incontrôlés tellement ça me fait mal et plaisir en même temps.

« Encore » « Encore » « Plus… »

J’ai du mal à me contenir, comme d’habitude.

Une pression à l’arrière de ma tête. Je me laisse conduire, m’accroupi devant lui et trouve sans problème sa virilité malgré ma cécité. Je l’embrasse doucement, prend le temps de passer ma langue sur toute sa longueur. Mes mains le caressent doucement et l’une d’elle prend son membre pour commencer de petits va et vient. Je fais attention de ne pas lui faire de mal. J’y vais doucement, tranquillement.

Il soupire. Quel joli son. Il en veut plus.

Sans attendre je le prends en bouche et en même temps que je commence mes mouvements, titille son bout de la langue. Je resserre de temps en temps mes lèvres autour de sa verge et il gémit. Un gémissement qui part dans les aigues.

Une douce symphonie pour moi.

J’augmente un peu la vitesse. C’est fou ce que je peux aimer le sucer. Oui, j’aime vraiment ces moments-là. Il est si délicieux…je suis l’homme le plus heureux du monde.
Je continue ma fellation, variant les plaisirs, jouant avec mes lèvres et ma langue pour son propre plaisir.

Quand à lui, ses mains parcourent mon dos et atteignent mes fesses. Je me cambre légèrement alors qu’il passe un doigt sur le petit tissu, juste en bas de mon dos. Il s’attarde dessus quelques secondes, me faisant frissonner.

Et puis soudainement il attrape le string et tire dessus, le faisant encore plus rentrer entre mes fesses. Je pousse un petit cri étouffé par son membre dans ma bouche et gémit alors qu’il commence à effectuer des petits frottements avec, tout près de mon entrée. Je suis complètement oppressé, s’il n’arrête pas rapidement de faire ça, je vais jouir…j’en ai trop envie…

Il lâche le tissu aussi brusquement qu’il l’a prit et je tente de calmer les battements de mon cœur, me concentrant sur ma tâche. Continuant de gémir au-dessus de moi, il écarte la ficelle du string et fait glisser son index le long de mes fesses, jusqu’à trouver ce qu’il cherche.

Je n’ai pas eu le temps de me préparer qu’il introduit un doigt en moi, me faisant gémir de plaisir alors que je resserre un peu plus mes lèvres autour de sa virilité.

J’accélère mon rythme encore et encore, alors qu’il calque le va et vient de ses doigts sur ceux de ma bouche. De l’autre main il me caresse continuellement les cheveux. Je suis bien là…

Il se retire et comme lui, je m’écarte un peu. Sa main qui agrippe ma nuque me relève et j’attends le moment où ma bouche va rencontrer la sienne.

Enfin…

Il me frôle déjà, il sait que j’en meure d’envie. Ensuite il lèche doucement ma lèvre inférieure. Il la mordille alors que je fais tout pour me retenir.

Il finit par m’embrasser avec une telle violence et un tel désir que je me sens encore plus durcir. Il prend mon visage en coupe dans ses mains et malmène mes lèvres, joue avec ma langue alors que je le suis docilement, le laissant faire ce qu’il veut. Il va même jusqu’à sucer ma langue, m’affolant un peu plus.

Je sais ce qu’il fait.

Je sais comment les choses vont se dérouler.

Habituellement, soit il me prend, soit il s’empale sur moi. Dans les deux cas je suis ravi. Mais là je sais que quand je ressortirai de cette chambre, j’aurai du mal à marcher.
Mes lèvres me font mal, j’ai l’impression d’être tout engourdi, d’être ouvert à vif. Pourtant il recommencerait que ça ne me gênerait pas. Il s’écarte de moi, descend du lit puis revient.

Je sens alors quelque chose de rugueux contre la peau de mes poignets. Il me les tient fermement alors qu’il les attache sans cérémonie avec une ficelle. C’est serré, mais je ne me plains pas. Comme avec un âne, il me tire vers ce que je pense être l’avant du lit et quelques secondes plus tard, quand je tire sur mes liens je suis bloqué. A quatre pattes, je suis attaché au lit dans l’incapacité de bouger. En fait la seule chose que je peux faire, c’est écarter les jambes…

Il se colle contre moi, derrière moi et ses mains caressent à nouveau mon dos. Je sens sa grosseur se frotter contre mes fesses et je gémis un peu fort. Trop fort d’ailleurs parce que je reçois une petite claque qui me met en appétit. Je me mords méchamment la lèvre inférieure. Encore une fois il attrape les bords de mon string et me l’enlève lentement. Je lève une jambe, puis l’autre.

Il me caresse maintenant les fesses, les pétris, les frappe aussi. J’ai chaud…je brûle…je vais exploser d’un moment à l’autre. Je sens la sueur perler le long de mes omoplates avant même qu’on ait commencé quoique ce soit. En même temps il se met à se masturber entre mes fesses… ce gars est complètement taré et sadique ! Mais bon dieu qu’est-ce que j’aime ça !

Et sans prévenir il me pénètre violemment, sans me demander mon avis ou quoique ce soit. Il sait qu’il n’en a pas besoin parce que le cri de plaisir mêlé à la douleur que je pousse lui prouve que ce qu’il fait est ce que je désire.

Il n’attend pas trois ans et commence tout de suite à faire de profonds et rapides mouvements de hanches en moi, le son de ses hanches frappant mes fesses emplissant la chambre. Si je me retiens un peu au début, maintenant je n’en peux plus. Il y va à grands coups de reins qui me font presque hurler de plaisir. Je tire sur mes liens, essayant de m’accrocher à quelque chose pour ne pas tomber mais c’est peine perdu. Chaque coup de butoir m’écorche les poignets en même temps qu’une vague de jouissance me traverse le corps. Pas étonnant qu’il ait pris cet hôtel, les lits ont des barreaux…Je m’y accroche alors, sentant ses doigts s’enfoncer dans ma chair pour mieux me pénétrer.

Les mouvements rapides sont remplacés par des plus lents mais non moins profonds. Il touche à présent ce point en moi qui me fait gémir comme un damné. J’ai la gorge sèche à force d’avoir la bouche ouverte pour tenter de respirer.

Il ne me le permet pas.

Je le sens s’allonger sur moi et accélérer encore, ma voix part dans les aigues, signe que je ne tiendrai pas longtemps à ce rythme. Il mord mon oreille, pince mes tétons…fait tout pour accélérer ma jouissance. Lui aussi se fait plus empressé mais c’est moi qui jouis en premier. Comme presque à chaque fois.

Je crie à en perdre ma voix, à m’en déchirer les poumons. Mais putain ce que ça fait du bien ! Il se retire de moi et je m’affale sur le lit, toujours attaché. Mes jambes flagellent, ma respiration est chaotique.

Mais ce n’est pas terminé.

Il me détache, m’attrape d’une poigne ferme par les cheveux et conduit mes lèvres jusqu’à sa verge gonflée qui ne demande que de l’attention et de se libérer. Je le prends entre mes lèvres et le suce habillement, rapidement, si bien qu’il ne met pas longtemps à jouir dans ma bouche alors que je me délecte de sa semence, le léchant d’un bout à l’autre et passant ma langue sur mes lèvres après coup.

C’était parfait. Un délice de sensations fortes. Comment dire…je suis repu. Comme à chaque fois.

Nous avons pour habitude après chaque acte sexuel de prendre une douche. Toujours les yeux bandés, je le suis dans la petite cabine et me laisse faire dans ses mains. Puis nous revenons à la chambre et je me couche dans le lit alors que je l’entends se rhabiller tout de suite. Il part toujours le premier, évidemment.

Pour que je ne le vois pas.

Allongé sur le ventre, la joue sur l’oreiller, je le sens s’approcher de moi et il me caresse doucement les cheveux avant de m’embrasser. Il remonte ensuite le drap jusqu’à mes épaules et finit par s’en aller.

Je m’endors, totalement apaisé.

Debout 6 heures. Petit-déjeuner, douche, métro. Je traverse la rue et passe les portes de l’immense bâtiment qui contient les bureaux de mon entreprise.

Je travaille dans un grand centre commercial, je suis directeur de sections. C’est moi qui dirige les différents secteurs que comporte cette immense machine à fric. A l’heure, comme toujours, je passe dans les différents étages du centre commercial, salue les employés, regarde rapidement l’organisation et les dossiers que me montrent mes assistants puis monte à mon bureau. Là je pose mon sac, ma veste et regarde le courrier. Des factures, des invitations, des projets, blablabla…toujours la même chose en somme.

- Hey Saku-chan ! T’es occupé là ? Je peux te parler ?

Je relève la tête de ma pile de lettres en soupirant.

- Aiba, je t’ai déjà dit de ne pas me parler aussi familièrement. Ou du moins pas devant les employés.
- Mou~ mais tu sais bien que je n’y arrive pas…c’est plus fort que moi.

Je lève les yeux au ciel et le questionne du regard.

- Qu’est-ce que tu veux ? Dépêche-toi, je suis très occupé.
- Ok ok ! J’ai envie d’intégrer un nouveau parfum à mes glaces.
- Quel parfum ?
- Curry.
- CURRY ??? Pour de la glace ???
- Bah quoi ? Je te signale que des tas de gens m’en ont demandé ! Et que toi-même tu les as aimé, celles que je t’ai fait goûter.
- C’est vrai…Non je ne sais pas si c’est une bonne idée.
- Toutes mes idées sont bonnes !
- Mais pas forcément rentables !

Le châtain commence à marmonner en se dirigeant vers la porte alors je soupire une nouvelle fois.

- Aiba. Apporte-moi un dossier avec les statistiques, des témoignages et tout le toutim et tu l’auras, ta glace au curry.
- Yatta ! Je te l’apporte dans la journée ! Matsujun ! On va avoir de la glace au curry !
- TU vas avoir de la glace au curry ! Personnellement ce n’est pas ma préférée…Directeur, le camion avec mes vestes en fourrure n’est toujours pas arrivé. Ça fait la troisième fois en deux mois ! Il faut faire quelque chose ! Je perds du temps ET de l’argent.
- Oui je sais Matsumoto. J’ai déjà essayé de régler ça et si ça continue, on changera de fournisseur.
- On ne PEUT PAS changer de fournisseur ! Il fait et a les plus belles vestes de tout le Japon ! Je veux celui-là et je ne veux pas qu’il soit en retard. C’est simple.

Simple, simple…c’est vite dit. Jun sort de mon bureau aussi vite qu’il y est entré, ne me laissant même pas la peine de parler. Comment j’ai pu tomber sur des chefs de sections aussi têtus et folledingues ??? Je feuillette à nouveau mes factures et fait soudainement les gros yeux. M’emparant du téléphone, je compose le numéro de l’étage 3 et attend en pianotant.

- Où est Ohno ?
- Je ne sais pas Directeur.
- Trouve-le et dit-lui de monter. J’ai à lui parler.

J’attends bien 1 quart d’heure avant de voir passer un homme rêveur devant mon bureau. Il s’arrête devant moi et me regarde avec un petit sourire.

- Ohno, c’est quoi ça ?
- De quoi ça ?

Je lui montre la facture.

- Comment ça se fait qu’il y a deux mois tu as acheté pour autant de Yen de matériel de pêche et que le mois dernier tu n’aies acheté aucune fourniture mais vendu le double !? Tu m’expliques ?
- Ah ! J’ai oublié de donner ma commande au fournisseur…Je suis allé pêcher ce week-end et j’ai attrapé un thon gros comme ça !

Il me montre avec ses bras alors que moi je soupire d’exaspération.

- Dépêche-toi de renflouer les rayons parce que si ça marche aussi bien ce mois-ci que le mois dernier, on en aura besoin. Allez file ! Et achète-toi une mémoire bon sang…

Le basané sort de mon bureau et je réussis à finir de trier mes papiers avant que le dernier cas parmi les chefs de section du centre commercial n’entre, l’air encore plus vicieux que les jours d’avant.

- Qu’est-ce que tu veux toi aussi ?
- Oh oh oh…pas besoin d’être aussi agressif Directeur. Masaki va ajouter un nouveau parfum de glace ?
- Déjà au courant…
- Je suis les oreilles et les yeux de ce CC, Directeur.
- Non, tu es responsable de la section informatique et jeux vidéos du Centre commercial, c’est tout. Ne te la joues pas détective ou espion là. Ce n’est pas une cours de récréation ici. Déjà entre l’autre qui passe son temps à inventer des trucs farfelus, un autre qui se prend pour la princesse et le troisième qui en oublierait presque jusqu’aux motifs de sa présence ici…
- Un massage ?

Je le regarde, étonné mais décline.

- Ça ira.

Je lui fais signe de partir de la main lorsque je le vois me fixer avec attention.

- Quoi ?
- Directeur…votre poignet…vous vous êtes blessé ?

Je baisse les yeux sur mon poignet irrité par les liens qui m’ont attaché au lit de l’hôtel la veille. Les marques sont encore bien visibles et témoignent de la brutalité à laquelle j’ai été soumis. Je rabats ma chemise dessus et fais comme si de rien n’était.

- Non non.

Malheureusement Jun est arrivé entre temps et a remarqué aussi les marques rouges sur mes poignets.

- On dirait…que vous avez été attaché. On ne vous a pas séquestré quand même ? Vous allez bien Directeur Sakurai ?
- Oui je vais bien.
- Si on vous force vous savez…
- On ne me force à rien Ninomiya alors taisez-vous et allez travailler !
- Bon, alors si on ne vous force pas…Ah, une dernière chose. Je compte acheter le dernier jeu de Mario. Un vrai succès ce sera, assurément.
- Bien bien.
- Et la nouvelle Wii de Samsung.
- Est-ce vraiment nécessaire ?
- C’est un bijou de la technologie.
- Dis plutôt que tu vas t’en servir pour ton plaisir personnel.
- J’ai d’autres plaisirs que ceux-là vous savez…
- C’est non. On verra selon l’évolution du marché. Le jeu ça ira amplement. Maintenant sortez de mon bureau tous les deux.

Je les expédie rapidement et m’adosse au dossier de mon siège en fermant les yeux. C’était moins une qu’ils découvrent tout. Que penseraient mes employés de moi s’ils apprenaient que je me fais sexuellement dominer par quelqu’un d’autre ? Au revoir le statut de directeur charismatique et imposant hein…Non non, pas question que ça se sache. En plus un tel scandale me ferait virer ! Je doute que la hiérarchie apprécie mes petits jeux de sexe avec mon inconnu…

D’ailleurs…est-ce si visible que ces marques sont celles de liens ? Non, après mûre réflexion. Il faut le savoir. Ou alors être bon devin. Mais dans ce cas-là…comment Jun a fait pour…Non non non non non…ce serait...bizarre. Pas quelqu’un d’ici. Et surtout pas quelqu’un que je commande ! Ce serait absolument…grisant…Non, il faut que j’arrête de penser comme ça. Mais je ne suis pas sans savoir que la vie que je mène n’est pas « normale ». On pourrait presque dire que j’ai une double vie. Et si vraiment Jun est la personne qui me domine en dehors des murs de ce bâtiment…alors cette hypothèse ne peut que se confirmer. Je le domine la journée, il me domine la nuit…

Je ne peux m’empêcher de sourire à cette perspective. Dans ma tête je m’imagine mon chef de section vestimentaire en dehors du travail. Et sous un autre angle. Ça fait un moment que je ne l’ai pas regardé. A vrai dire mes nuits avec mon inconnu me satisfont tellement que je ne regarde plus les autres hommes. Ils ne me plaisent plus. Pourtant, si je m’en souviens bien, Jun est loin d’être déplaisant. Viril, le regard dur et le ton tranchant. Il pourrait parfaitement me dominer…

Sauf que parfois j’ai l’impression qu’il me domine déjà ici. C’est vrai quoi, il est tellement exigeant que je cède la plupart du temps à toutes ses demandes.

Raison de plus pour penser que c’est de lui qu’il s’agit.

Il faudrait qu’il me touche, pour que je sache pour de bon. S’il me touche, si je sens ses mains sur moi alors je saurai. Mon inconnu m’a touché tant de fois que je le reconnaitrai entre mille.

Je passe les 15 minutes suivantes à fantasmer à moitié sur lui, à me demander ce qui changerait si je lui disais que je sais qui il est pour moi. Mais peut-être que pour lui n’est-ce qu’un jeu ? C’est vrai que je me suis laissé prendre…au jeu justement. Peut-être que j’éprouve des sentiments déplacés…

Arrive le midi. Je descends à la petite cafétéria pour les employés et vais m’assoir à une table, seul.

Enfin pas pour longtemps.

Aiba est le premier à s’assoir à côté de moi avec déjà un énorme sourire aux lèvres et un entrain que je n’aurai sûrement jamais. Il commence à parler sans s’arrêter à peine assis. Je l’écoute patiemment, essayant de le suivre tout en mangeant.

Le suivant est Jun, justement. Il s’assoit en face de mal et j’avoue que j’ai du mal à le regarder. Quel idiot, je vais me faire démasquer si je fais ça ! Lui ne remarque apparemment rien. Mais bon, avec Jun on ne peut jamais rien savoir de ce qu’il pense. Ni de ce qu’est sa vie en dehors du centre commercial.

Ohno vient s’assoir à côté de lui et, étrangement, il lui fait plus de place qu’il n’en a besoin.
Le dernier à arriver est Ninomiya. Tout comme moi, il s’assoit et commence à écouter ce que raconte Aiba. En fait presque tous les midis se déroulent ainsi. On s’assoit avec notre nourriture et on écoute le glacier parler pendant plus de 15 minutes. De temps en temps l’un de nous réussit à en caser une. Je me demande comment il fait pour parler autant…et surtout pour trouver un bon sujet de conversation à chaque fois sans tomber dans la répétition.

Je vais pour prendre le pichet d’eau sur la table, la gorge sèche. Jun a apparemment eu la même idée que moi…et nos mains se touchent.

J’attends alors quelque chose…

Mais rien.

Aucune réaction.

Ce n’est pas lui. Ce n’est pas mon inconnu. Je ne le reconnais pas. Son toucher m’indiffère.
Pourquoi je ne me sens pas pleinement soulagé ? Peut-être parce que ça fait 4 mois que j’attends de découvrir l’identité de mon maître…

Et peut-être aussi parce que Jun aurait été parfait.

Enfin bref, plus besoin d’y penser, mon inconnu n’est pas ici. Je me suis encore fait des idées.

Je remarque alors le regard d’Ohno rivé sur mes poignets, que je cache autant que je peux à nouveau. Qu’est-ce que c’est que cette lueur dans ses yeux ? De…l’envie ? Je suis sûr d’avoir vu une étincelle de plaisir dans son regard. Et il ne les quitte pas, c’est effrayant.

Oh…ça pourrait être lui ?

Je le regarde jouer avec ses baguettes dans ses mains. Tiens, il porte encore un pull long aujourd’hui… c’est fréquent depuis quelque temps. Je ne me souviens même plus à quoi ressemblent ses bras…

Le déjeuner se termine et je retourne à mon bureau pour m’occuper de mes papiers. Pourtant, toute l’après-midi le regard d’Ohno sur mes poignets m’obsède. Il cache quelque chose…un tel désir dans le regard rien qu’en voyant des marques rouges vifs…
C’en est trop. Il faut que je sache. Je me dirige vers le 3ème étage et traverse les rayons, le cherchant.

Je le trouve vers le stock d’hameçon où il explique à un client comment s’y prendre pour l’accrocher. J’attends qu’il finisse et quand c’est le cas, je lui demande de venir avec moi. Il me suit bien docilement jusqu’à un coin du magasin et je me retourne vers lui, nerveux.

- C’est toi ?
- Comment ça ? De quoi parlez-vous Directeur ?

Je lui montre mes poignets et aperçoit encore cette lueur dans ses yeux marron.

- Pourquoi tu les regardes comme ça ?
- J-Je ne fais rien…
- Tu me mens.
- Faites voir.

Il se saisit brusquement de ma main, me faisant grimacer quand il passe un doigt sur mon poignet.

- Mais qu’est-ce que tu fais là ? ça t’amuse ?
- Vous devriez mettre de la pommade dessus. J’en connais une bonne qui marche très bien, je l’utilise souvent.
- Que…pour faire quoi ?

Le jeune homme regarde autour de lui et se penche vers moi.

- Je sais ce que vous faites Directeur.
- Qu-Quoi ??!!

Je commence réellement à paniquer. C’est lui ? Pas lui ?

- Je vous comprends parfaitement. Tenez, regarder.

Il remonte les manches de son pull, me laissant voir les mêmes marques que les miennes, aussi récentes. Comme si lui aussi…

- Je n’ai pas pu m’empêcher de regarder les vôtres, ça me rappelle tellement de choses…
- Je ne…suis pas comme ça. Je me suis juste fait mal…
- Voyons Directeur, je ne suis pas dupe. Vous et moi, on est pareil. Nous sommes des dominés et vous n’avez pas à être gêné ou honteux. Même si je ne pensais pas ça de vous…

Je le regarde avec des yeux ronds mais au lieu de m’offusquer ou autre, je ne pense qu’à une seule chose. Ohno n’est pas mon inconnu. Il vient de le dire, il aime se faire dominer…alors jamais il ne serait mon maître n’est-ce pas ?

Retour à la case départ.

- Je suis content d’avoir trouvé une personne comme moi. Je vous avoue que moi aussi, au début, j’étais un peu honteux. Mais Jun-sama m’a persuadé que…
- Jun-sama ????!!!!
- Bah…oui. Mon maître. Oh non…j’ai fait une gaffe pas vrai ? Je croyais que vous étiez au courant…Ohlàlà il va me punir…

Jun un maître ?? Ça changeait tout…et ça me faisait encore douter. Donc ça pourrait bien être lui. Ou du moins ça expliquait le fait qu’il reconnaisse des marques de liens quand il en voyait.

Non, dans tous les cas ça ne pouvait pas être Jun. De une un bon maître qui se respecte n’avait pas plusieurs soumis en même temps. Et de deux, le toucher ne trompait pas.
Bilan : j’ai juste appris que deux de mes chefs de sections entretiennent des relations homosexuelles sadomasochistes. Génial.

- Ce sera tout Directeur ? Je peux y retourner ?

Je hoche rapidement de la tête et retourne lentement à mon bureau tout en réfléchissant.
Réflexion qui a pour conséquence une collision sévère avec un autre de mes chefs de section…le plus déjanté à ce jour.

- Aiba ! Regarde où tu mets les pieds !
- Pardon Saku-chan ! Je vais ramasser.
- Arrête de m’appeler comme ça…

Le jeune homme fait un petit sourire et ramasse les moules à glace et autres ustensiles qu’il portait à ce moment-là. Je soupire et finis par aller l’aider. Après tout, je suis aussi en faute que lui.

- Désolé, fais-je ne me relevant. Je ne regardais pas vraiment où j’allais.
- Pas grave ! ça arrive ! Mais…

Il se penche alors soudainement vers moi, très très près et me susurre à l’oreille.

- Tu devrais être puni pour ça Saku-chan.

Mon sang ne fait qu’un tour, ma respiration s’accélère.

Qu’est-ce que ça veut dire ? Est-ce que ce monde ne tourne pas rond aujourd’hui ?

Déjà Jun qui semble tout savoir des pratiques qui m’occupent, Ohno qui se retrouve être un pur DoM, Aiba qui me parle comme s’il était…

Je lève de gros yeux ronds surpris vers lui, la bouche entrouverte. Donc ce serait lui… ? Lui qui me sourit tout le temps ? Lui plein d’entrain toutes les heures de la journée non-stop ? Lui qui me déroule presque le tapis rouge quand je marche et semble me vouer un culte ? Lui qui semble si doux ?

Je ne comprends pas…je ne comprends RIEN !

- Aiba…je…
- Ukeruuuuuuuuuuuuu~ Je t’ai bien eu hein ! J’étais sûr que tu allais réagir comme ça ! On m’a proposé de jouer dans une petite pièce de théâtre où je fais un homme espiègle qui passe sont temps à s’amuser avec les nerfs des autres. Ce que tu as entendu était une de mes répliques, un peu modifiée bien sûr parce que tu ne joues pas dans la pièce. Alors ? J’ai été bon acteur ? ça t’a plu ?

EHHHHHHHHHH ??? Non mais…EHHH ??? C’est quoi ce bazar à la fin ? Alors tout ça n’était qu’une mise en scène ?

Une pauvre mise en scène…

Et moi je me suis fait prendre au piège. J’ai cru qu’il était…alors qu’Aiba pourrait être tout sauf un sadique. Quel idiot je suis. On ne fait pas plus gentil et doux que cet homme-là. Mais où ai-je la tête parfois ? J’ai commencé à m’imaginer des tas de choses, tout ça à cause d’une pauvre phrase…qui ne m’était même pas destinée…

J’ai un problème. Je dois en avoir un. Je ne sais pas, ça doit être cette nuit qui m’est montée à la tête. L’accumulation de toutes ces expériences. Pourquoi aujourd’hui, chaque personne à qui je parle semble être mon inconnu ?

- Oui c’était très bien. Ils ont bien fait de t’engager. Mais que ça ne nuise pas à ton travail ici !
- Oui chef ! Maintenant tu m’excuses mais j’ai un dossier pour une glace au curry à finir !

Ah oui, la fameuse glace au curry…

Bon revenons à nos moutons.

Ce n’est pas Jun, ce n’est pas Ohno, ce n’est pas Aiba. En fait, depuis le début je me fais des idées…Je ris nerveusement.

Le reste de la journée se passe bien. Mieux qu’avant surtout. Aiba nous propose à tous d’aller au onsen dans la soirée. Même si je n’ai pas trop envie, j’accepte l’invitation. J’ai envie de me détendre avant mon rendez-vous de ce soir.

J’arrive tout seul et j’entre à l’intérieur. Il fait déjà bien chaud et je retrouve Ohno et Aiba qui parlent avec animation tout en se changeant. Mon regard ne s’est jamais trop attardé sur eux, c’est vrai. Cependant, là, je ne peux m’empêcher de jeter un coup d’œil sur celui du pêcheur, repérant quelques marques que je connais bien mais invisibles pour un œil non connaisseur. Ce qu’il a dit était donc vrai…

Je me change rapidement et met une serviette autour de ma taille alors que Jun et Ninomiya entre à leur tour. Je les salue rapidement et commence à sortir lorsque je m’arrête à peine arrivé à la porte et me retourne, le cœur battant rapidement dans ma poitrine.

La façon dont il a enlevé sa chemise…

Je ne connais qu’une personne à ce jour qui enlève les chemises comme on enlève un T-shirt. Il ne la déboutonne pas. Il écarte juste un peu le col, enlève les pans de dans son pantalon et la passe par-dessus de sa tête, pour la jeter négligemment plus loin.

Je porte souvent des chemises pour aller à mes rendez-vous nocturnes. Et à chaque fois, mon inconnu les enlève de la même manière…

…que Ninomiya le fait.

Ce n’est pas possible hein ? Le cauchemar recommence ! Je suis encore en train de trouver des ressemblances entre mon maître et mes employés ! Mais j’ai un grain ou quoi ?

Et puis de toute façon pleins de gens enlèvent leur chemise comme ça non ? Mais à quoi je joue bordel…

Je me frappe les joues pour me remettre les idées en place et me glisse à l’intérieur du bain, nageant un peu dans l’eau chaude avant de me placer sur un bord et regarder les autres arriver.

Le reste n’est qu’un flou total. Je sais juste que j’ai passé tout mon temps à détailler chacun de leur mouvement, de leurs paroles, voir si l’un d’eux serait le mien…mais je sais que je me fais des films. Peut-être suis-je malade ? Ou alors je rêve…

Oui, je dois complètement rêver.

Je pars en premier pour ne pas être à l’heure à mon rendez-vous, me sèche et m’habille rapidement pour me reposer un peu chez moi avant d’aller dans cette même chambre d’hôtel.

Sauf que cette nuit-là, les choses sont différentes.

J’observe. J’écoute. J’analyse.

Chacun de ses mouvements, de ses habitudes. J’ai fait exprès de mettre une chemise. Et encore une fois, il la retire par le haut au lieu de la déboutonner.

Je suis perturbé. J’ai été mauvais ce soir-là, je le sais. Mais je n’arrive plus à faire la part des choses.

C’était comme si mon inconnu était ces 4 personnes. Et si…

Et s’ils s’amusaient avec moi, chacun leur tour ? Non, c’est absurde. Ils ne feraient pas ça n’est-ce pas ? Ce n’est que le fruit de mon imagination trop fertile…

Pourtant je sais au fond de moi que, quelque part, je n’ai pas tort. Que l’un d’eux est celui qui me fait vibrer tous ces soirs.

Mais comment le savoir ? Comment en avoir le cœur net ?

Je suis assis à mon bureau lorsque j’entends frapper à ma porte. C’est Ninomiya. Je lui permets d’entrer et continue de taper à l’ordinateur alors qu’il s’assoit sur la chaise devant mon bureau.

- Que veux-tu ?
- La nouvelle Wii.
- J’ai déjà dit non. Une seule coûte déjà extrêmement cher et on n’est pas sûr que les clients l’achèteront. A ce prix-là…
- Mais il nous la faut Directeur.
- Qu’est-ce que tu ne comprends pas dans le mot « Non » ? Ce truc coûte une fortune et de toute façon une autre sortira d’ici à 2 mois. Je ne vois pas l’intérêt de l’acheter en plusieurs exemplaires et de se ruiner.
- Parce que JE LA VEUX !

Il se lève et tape brusquement sur mon bureau, faisant trembler mes stylos et tomber une pile de dossier.

- Non mais tu te crois où là ?! On n’est pas chez toi, la loi c’est moi qui la fait ici !! Alors si je dis « pas de Wii », c’est « pas de Wii » ! Et je ne tolérerai pas qu’on me désobéisse !
- Tu vas faire ce que je dis sinon…
- Non mais tu t’entends Ninomiya ?? Tu me tutoies, tu me menaces, tu me cries dessus…Je suis ton supérieur !
- Et alors ? Masaki tutoies lui aussi !
- C’est différent.
- Et en quoi ? C’est un employé, tout comme moi ! Ah non, il y a une chose de différente…
- Continue comme ça et je te renvoie.
- Vous oseriez ?
- Oui. Pour insubordination.
- Ou parce que je refuse de me plier devant vous. Me faites pas rire.
- De quoi tu parles encore ?

Il se penche vers moi et me fixe de ses yeux perçants qui, comme toujours, me mettent mal à l’aise.

- Ça ne vous plait pas de faire le chef. Non vous aimez autre chose, je le sais.
- …D-De…qu’est-ce que ça veut dire ?
- Vous le savez aussi bien que moi. Virez-moi si ça vous chante, mais vous en paierez le prix. Et sincèrement, vous ne trouverez personne de plus qualifié que moi pour ce boulot.

Mon esprit est confus. Le doute est revenu en moi. Jun, lui, Aiba…chacun a des gestes ou des paroles qui me perturbent. Mais Ninomiya encore pire que les autres à présent. Il parle…du job de chef de section informatique n’est-ce pas ? Et pas autre chose ? Que veux dire « m’en faire payer le prix » ??

Je suis complètement perdu, si bien que je le laisse partir sans dire un seul mot de plus.


J’hésite à prendre un congé.

Je pense que je vais le faire.

Je suis fatigué en ce moment. Trop de choses à penser, à démêler, à enregistrer…mon cerveau sature. Et mon physique aussi. Ces séances de sexe me rendent plus faibles chaque jour parce que je n’arrive pas à récupérer entre temps. Trop de choses…

Je reste couché dans mon lit et laisse le réveil sonner. Tant pis pour le boulot. J’irai demain. Ou après-demain. Après tout je n’ai jamais été absent une seule fois depuis des années. J’ai bien le droit à une pause non ?

La journée passe lentement. Mes occupations ? Dormir, regarder la télé, manger. Et ça fait du bien. Je me repose, je reprends des forces, j’ai le temps de réfléchir.

En fait non, je ne réfléchis pas. Mon cerveau est en mode pause aujourd’hui.

Quand je me réveille, il est 23h passés. Ohoh…Grosse bêtise. C’était notre dernier soir de la semaine aujourd’hui, et je l’ai manqué…Et s’il ne revenait plus ? Et s’il m’en voulait tellement de l’avoir abandonné qu’il refuse de me voir à nouveau ?

Les larmes me montent aux yeux.

Mais c’est quoi mon problème ???? Pourquoi j’ai fait ça ? Pourquoi je ne suis pas allé travailler ? Pourquoi je ne suis pas allé à mon rendez-vous ??? Mais pourquoi…Ces quelques heures avec lui sont mes moments rien qu’à moi, des moments où je suis enfin moi-même, où je me laisse aller sans crainte, où tous les problèmes de la journée disparaissent ou me paraissent futiles…

Maintenant je n’en aurai plus. Je vais devoir me débrouiller tout seul. Je ne pourrai plus sentir ses mains sur moi, sa bouche contre la mienne et sa virilité en moi qui me donne tant de plaisir. Je ne pourrai plus jamais avoir l’opportunité ni la chance de sentir sa chaleur de la façon la plus intime qui soit. Plus jamais de mordillements, d’orgasmes puissants ni de réconfort à me laisser aller dans les bras d’un homme dont je ne connais même pas le visage mais en qui j’ai une confiance totale. Même ce foutu string va me manquer…

Je me précipite hors du lit, met un pantalon et une veste au hasard et sors dehors à la vitesse de l’éclair. Je courre dans la rue aussi vite que possible, espérant, priant pour qu’il y soit encore. Que par chance, il m’ait attendu…

Quand j’arrive, la porte est ouverte. J’entre silencieusement et ose à peine allumer la lumière. Il n’y a personne. Mon cœur se serre dans ma poitrine et je remarque un petit papier sur le lit, glissé entre la couverture et l’oreiller. Je m’en saisis et le regard longtemps avant de le déplier et de lire ce qu’il y a d’écrit dessus.


Une larme coule le long de ma joue. Je ferme les yeux, froisse le papier maudit entre mes mains.

Comment ai-je pu être aussi idiot ? Il aura suffit que j’arrive en retard…Non, il ne s’agit pas juste d’arriver en retard, mais de ne pas venir du tout. Je l’ai trahi. J’ai trahi sa confiance. Il était là pour moi et je l’ai rejeté. J’ai refusé de le voir.

J’ai payé le prix.

J’ai payé le prix…

Je démissionne…

Ninomiya…

Je me frotte les yeux rapidement et déplie le papier pour regarder l’écriture. Heureusement, c’est écrit à la main. J’ai une bonne mémoire visuelle et je connais à peu près toutes les écritures de mes employés. Surtout des chefs de section…

Le doute, lui, a disparu.

Je sais.

Tout s’éclaire à présent.

La façon d’enlever une chemise, tous ces sous-entendus qu’il m’a laissés pendant tellement de jours et de semaines. « J’ai d’autres plaisirs » « ça ne vous plait pas de faire le chef » « vous aimez autre chose » « je veux… » « vous en paierez le prix »…Il voulait me punir ce soir. Et je me serais fait pardonner.

A la place j’ai fuit. J’ai fuit le boulot, j’ai fuit ma relation avec lui, j’ai tout foutu en l’air…et pourquoi ? Parce que j’avais essayé de faire mon boss alors qu’il a raison…je déteste donner des ordres. Je n’ai jamais su en donner. Ce que j’aime, moi, c’est co-diriger. J’ai trop de poids sur mes épaules, je n’aime pas ça. Il était parfait pour me faire oublier la pression…Pourquoi je suis directeur au fait ?

Parce que j’aime bien organiser, faire des beaux projets…mais pas engueuler, exiger, punir…non, tout ça n’est pas pour moi.

Ce n’est pas moi.

Mais je fais quoi alors ?

Je démissionne ? Non pas question. J’en ai chié pour en arriver là, pas question que j’abandonne le navire maintenant.

Par contre je peux demander à la hiérarchie de me faire aider…un co-directeur, ou une co-directrice…ça m’aiderait vraiment. Je me noie dans les papiers malgré mon sens strict de l’organisation. Oui, je peux faire ça.

Je vais le faire. Ils ne peuvent pas me le refuser.

Et pour lui ?

Je pourrais aller m’excuser…

En fait je serai prêt à me mettre à genoux devant lui pour qu’il me reprenne. Pour qu’il ne m’abandonne pas comme moi je l’ai fait. J’aimerai tellement qu’il soit là avec moi en ce moment…

Je regarde la chambre vide et froide une dernière fois puis en sort avec mon papier froissé dans ma main. Le cœur lourd, une boule à la gorge et cette envie de pleurer qui ne me quitte pas.

J’occupe ma nuit à écrire ma lettre pour mes supérieurs. J’y mets tout ce que je peux, toute l’énergie que j’aurai dû fournir pour mon amant. Mon maître. La seule personne que j’aime de tout mon être, sans restriction.

C’est donc éreinté que j’entre dans le centre commercial le jour suivant. Je salue brièvement mes employés alors qu’Aiba se jette sur moi, me harcelant pour savoir pourquoi je n’étais pas là hier, si je vais bien,…Je réponds évasivement, laconiquement…en fait je ne cherche qu’une seule personne des yeux. Une personne qui a disparu.

Je n’ai jamais eu à chercher Ninomiya pendant tout le temps où on a travaillé ensemble. Il apparaissait toujours au moment opportun, ou quand je m’y attendais le moins. Un magicien…

En fait il ne me reste à faire qu’une chose pour que je suis sûr et certain qu’il est bien mon inconnu. Il faut qu’il me touche. Il faut que je sente ses mains sur moi. Mais au fond, je sais que c’est lui à présent. Je m’imagine ses mains et j’en tremble presque debout.

Le conseil a accédé à ma demande. Et il a nommé Jun co-directeur. Je ne m’y attendais pas, vraiment pas. Je pensais qu’ils prendraient quelqu’un d’extérieur mais en fait, ça me va tout autant. Jun est quelqu’un de droit, honnête et méthodique. Je pourrai me reposer un peu s’il est là. En plus il est né pour commander, alors que moi…

J’ai fait blocus auprès de la hiérarchie à l’instant même où ils ont songé à remplacer Ninomiya. Il n’en est pas question, et mes chefs de section m’ont soutenu. Nous nous retrouvons donc avec un secteur informatique sans dirigeant.

Ils ne savent pas pourquoi je fais ça. En apparence, je ne l’apprécie pas beaucoup. Mais en fait c’est tout le contraire. Cet homme, je le désire plus que tout au monde. Sa présence me manque.

Cette nuit je me suis réveillé en sueur dans mon lit. J’ai rêvé de lui et je me suis masturbé. J’ai besoin de lui, il me rend dingue.

J’ai l’impression de mourir à petit feu.

Les jours me paraissent plus longs que la normale. Je ne veux pas me réveiller le matin et je redoute le soir, quand je finirai le travail et me retrouverai seul face à moi-même, et à ma bêtise.

Alors je passe beaucoup de mon temps avec Aiba. Il me divertit, me fait rire…mais ça s’arrête là. Et au fond, il sait comme moi que ce n’est pas suffisant.

Ça fait un mois.

Un mois que chaque soir, de 21h30 à minuit, je vais dans cet hôtel et reste assis, attendant qu’il arrive.

Ça fait un mois que je poireaute dans l’espoir qu’il revienne pour moi, alors que je l’ai trahi.
J’aimerai dire que ce n’est pas de ma faute. Que ce jour-là, j’étais trop fatigué et je ne me suis pas réveillé à temps. Mais au fond ce n’est pas ça. En fait, j’ai fait exprès de ne pas me réveiller. Si vraiment j’avais voulu y aller, j’y serai allé. Je me serais réveillé tout seul.

Il m’en veut autant que je m’en veux. Peut-être moins.

Le médecin m’a dit hier que je faisais une dépression. Rien de grave, mais que si je voulais que tout se passe bien, il fallait que je reprenne ma vie en main. Qu’est-ce que je peux lui répondre ? Il n’y a qu’une seule chose qui pourrait me guérir…


4 semaines, 4 jours, 21h et 30 minutes après que je l’ai vu pour la dernière fois, je suis de nouveau assis sur ce lit.

Calme en apparence, mais troublé à l’intérieur. J’attends.

5 min…10 mn…25 mn…Il est 22 heures tapantes. C’est le moment. Soit la porte s’ouvre, soit je tombe encore plus dans ce trou noir qui me guette, qui veut me prendre.

Je suis en manque.

Cet après-midi, en plein speech je me suis mis à penser à lui alors que je parlais de la nouvelle Wii de Samsung, que finalement nous avons acheté par dizaines (il avait raison, un vrai carton). Et j’ai bandé. Je me sentais si mal et honteux que je me suis enfuit en courant. Jun m’a dit que ce n’était pas grave et Aiba a tout fait pour me consoler mais seul Ohno m’a vraiment compris. Il m’a expliqué que parfois, il lui suffisait d’entendre Jun élever la voix pour avoir une érection. « Mais je suis ultra sensible », avait-il dit. Je dois l’être aussi. Il m’avait suffit de penser à son air espiègle et ses yeux perçants pour que ça me chauffe dans le bas ventre comme si on m’avait mis une bouillotte à cet endroit-là. J’aimerai bien dire que plus jamais ça n’arrivera, mais ce serait me mentir à moi-même…

Je deviens nerveux. Il est 22h02, et il n’y a personne. Je ferme les yeux pour ne pas voir le temps passer. Je le fais souvent à présent. J’essaye de penser à tout ce qu’il aurait pu me faire…je sais que je me fais encore plus mal ainsi.

La porte s’ouvre. Le même filet de lumière, le même pas, la même respiration calme…Il est là.

J’ai peur de tourner la tête, de voir qu’en fait je ne fais que rêver, que tout ça n’est que le fruit de mon imagination combiné à mon manque. Pourtant la main qui se pose sur mon épaule ne me trompe pas. C’est bien lui. Le même frisson agréable me parcoure tout le corps et j’attends.

- Regarde-moi.

C’est la première fois qu’il me le demande. Et je ne me fais pas prier, sans pour autant me précipiter. Je me retourne lentement et croise ses yeux noirs durs comme de l’acier. Je baisse la tête, honteux alors que les larmes affluent au bord de mes yeux. J’ai envie de lui crier que je suis désolé, de lui pleurer, de lui chanter, de faire tout ce qu’il veut…mais je ne dis rien.

Son index passe sous mon menton et le relève doucement, me forçant à le regarder.

- Nino…

Il me gifle si violemment que je tombe en arrière sur le lit, me tenant la joue en pleurant silencieusement. Mais je le mérite.

- Notre arrangement était clair. Et ce que j’ai dit aussi. Que fais-tu encore là ?
- Je vous attendais…
- Pour quoi faire ? On s’est quitté.
- Non ! Je vous en prie, pardonnez-moi. J’ai fait une erreur, je le regrette. Je vous en prie, ne m’abandonnez pas…

Je m’accroupie devant lui, sur le lit et mon corps et parcourut de spasmes. J’ai peur. Peur qu’il ne veuille plus de moi. Peur qu’il ne me pardonne jamais ce que j’ai fait.

- Tu penses qu’il suffit de me supplier pour que j’oublie ce soir-là où j’ai attendu des secondes durant que tu veuilles bien venir me rejoindre ?
- Ce ne sera jamais suffisant je le sais. Je ferai tout ce que vous voudrez.
- Tu m’as abandonné Sho, à cause d’une histoire débile de jeu vidéo. Je n’ai plus confiance.
- Tout ce que vous voudrez…je vous en prie…je t’en prie Nino…

Ses yeux deviennent un peu moins durs et il m’agrippe les cheveux à la base de la nuque.

- Je vais te punir. Et tu ne te plaindras pas. Ensuite on verra si je te reprends ou pas.

Je hoche de la tête, prêt à subir mon châtiment.

Je m’attends à tout. Menottes, fouet, cire…peu importe. Je m’en fous. Je veux juste qu’il me punisse et que tout redevienne comme avant.

Je le vois sortir ficèles, foulards et menottes de son sac et les pose sur le lit, près de moi.

- Déshabille-toi.

Je le fais, restant juste en sous-vêtements osés devant lui.

- Tout.

J’obéis sans rechigner et attends sagement assis à genoux devant lui. L’air plus résigné que jamais.

Il me prend alors par le poignet et me colle dos contre les barreaux du lit. Le froid du métal contre ma peau me fait agréablement frissonner. Il m’attache à la manière de Jésus-Christ sur sa croix. Je ne comprends pas.

Puis il prend le foulard mais au lieu de me cacher les yeux, le passe autour de mon cou et l’attache au barreau lui-aussi. J’ai envie de lui dire que c’est trop serré, que j’ai l’impression d’étouffer.

Mais bien sûr, je ne dis rien. C’est ma punition.

Et quelques minutes plus tard, je découvre la totalité de ce châtiment. Il se déshabille tout en se caressant lentement, se passe de l’huile sur le corps, s’arrêtant bien vers ses tétons et son nombril, me faisant bouillonner intérieurement. Il sort alors un gode de son sac et le met dans sa bouche tout en me regardant avec de ces yeux…

J’ai chaud. Très chaud.

Devant mes yeux ébahis, admirateurs et brûlants comme la braise, il commence à se préparer tout seul avec deux doigts, gémissant comme un Dieu devant moi alors que je ne peux pas bouger. Je ne peux même pas calmer ce qui se passe en dessous de mon nombril.

J’ai besoin d’attention moi aussi. J’ai envie qu’il me touche.

Mais il ne le fera pas. C’est la punition. Moi je dois juste le regarder se donner du plaisir tout seul alors que je souffre le martyre en face de lui.

Il s’empale alors sur le jouet avec un long gémissement qui me fait encore plus durcir et j’essaye de me détacher tellement c’est intenable. Mes poignets me font mal et le foulard me coupe la respiration. Mes jambes bougent sans but précis…je ne fais que gigoter alors qu’il se donne du plaisir.

Et il ne se prive pas en plus, allant jusqu’à pousser des petits cris aigues à chaque fois qu’il bouge dessus. Il y va parfois lentement, parfois si rapidement que j’ai l’impression que je suis à la place du jouet.

Il me fait l’amour sans même me toucher.

Par contre il n’arrête pas de vriller ses yeux dans les miens. Ce regard pervers qui me fait bander comme un taureau.

Il va bientôt jouir, ça sentant à ses gémissements. Il va jouir et moi aussi.

Au final, c’est moi qui me suis laissé aller en premier. C’est fou non ? Je suis épuisé, courbaturé et tremblotant alors que pourtant je n’ai fait que regarder.

C’est un magicien. Il n’y a pas d’autres explications.

J’halète, tentant de reprendre ma respiration, tout comme lui. Il s’approche de moi et lèche le résultat de mon plaisir, me faisant soupirer. Puis il me détache, enlève le foulard et vint m’embrasser sauvagement, collant nos deux corps en sueur ensemble.

Il prend une nouvelle fois les commandes et je pleure de joie. Ça m’avait tellement manqué tout ça.

- Alors elle te plait ta punition ?
- O-Oui.
- Je m’en doutais.

Il s’écarte de moi et va ranger les affaires.

- Tu étais où ?
- Ici.
- Ici ? Je veux dire…ce mois-ci, tu étais où ?
- Ici je te dis. J’attendais.
- Tu…attendais ? Mais quoi ?
- Le bon moment.
- J-Je ne comprends pas.

Il pose son sac dans un coin et remonte vers moi sur le lit. Jouant avec mes cheveux, il me fixe sans ciller alors que je me sens rougir.

- Ce mot, cette absence…c’était ta punition. Je t’ai fait croire que je t’avais abandonné pour que tu comprennes ce que j’ai ressenti quand je ne t’ai pas vu venir, après cette mini-dispute au centre commercial.
- Mais pendant 1 mois…
- J’ai voulu voir aussi ce que tu ferais. Si tu m’attendrais, si tu te trouverais quelqu’un d’autre…
- C’est impensable.
- Je sais. Maintenant. Et je te remercie d’avoir gardé ma place de chef de section.
- Tu comptes revenir travailler ?
- Bien sûr, surtout que maintenant Jun est co-directeur alors je vais me faire un plaisir de venir l’embêter.

Je souris légèrement et me mords la lèvre.

- Qu’est-ce qu’il y a Sho ?
- Tu veux toujours de moi ?
- Bien sûr gros bêta.

Il me file une petite tape derrière la tête et je fais la moue.

- Au fait, quand t’en es-tu rendu compte ?
- Ah…La chemise. J’ai crû d’abord que c’était Matsumoto. Puis Ohno. Puis Aiba. Et finalement je t’ai vu enlever ta chemise au onsen et ça a fait tilt.
- Enlevé ma chemise ?

Ninomiya me regarde, vraiment surpris.

- Tu as une façon presque unique de le faire. Tu enlèves la chemise par le haut, sans la déboutonner. Tout le monde la déboutonne normalement. J’ai commencé à douter à partir de là. Je devenais complètement parano. Et…j’ai vraiment cru que tu ne reviendrais pas…
- Je suis là maintenant.

Je souris cette fois franchement, vraiment heureux. Il est là. Ça veut dire qu’il veut rester avec moi n’est-ce pas ?

- Au fait, la Wii se vend très bien. On a fait un bénéfice énorme.
- Tu vois, je te l’avais dit.
- Je sais…c’est stupide, tout a foiré à cause de mon incompétence…
- Chuuuut Sho…regarde-moi.

Je relève la tête vers lui, peu sûr de moi.

- Si je t’ai choisi c’est parce que tu es parfait. Au contraire, cette altercation nous a aidés. Regarde, maintenant tu sais qui je suis. Et tu es épanoui dans ton travail. En fait je suis content parce que je n’osais pas me dévoiler.
- Pourquoi ?
- Tu ne me voyais pas là-bas. Je n’existais pas pour toi. Te dire que j’étais l’homme de tes nuits aurait pu être une catastrophe. Je ne voulais pas te perdre, alors je n’ai rien dit.
- Si je ne te regardais pas c’était parce que j’étais trop occupé à penser à toi…

Je rougis légèrement après une telle confidence.

- Je sais.

Il me caresse lentement les cheveux et m’embrasse comme j’en ai toujours rêvé.

- Bon maintenant fini de pleurer. On rentre.
- Où ?
- Tu m’emmènes chez toi.

Je hoche de la tête, ravi et me rhabille aussi vite que possible alors qu’il fait tout pour m’en empêcher.


Tellement de choses ont changées, en si peu de temps.

Jun s’en sort très bien en tant que co-directeur. Mon boulot me parait trois fois mieux à ses côtés et nous sommes sur la même longueur d’onde. Il a réglé ce problème de camion en retard. Je n’ai jamais su comment.

Aiba invente encore et toujours des glaces farfelues mais mon dieu, si bonnes ! Ce gars est un génie. Un génie de la nourriture. Tout ce qu’il touche devient bon.

Ohno…bah c’est Ohno. Il a toujours des dossiers en retard, des trous dans ses commandes, il s’endort entre deux rayons…mais c’est un bon conseiller. Il m’a donné des indications pour ma relation avec Nino qui se sont avérées très utiles. On ne dirait pas, mais il en cache beaucoup ce bonhomme-là.

Et Nino…Oui je l’appelle ainsi à présent, parce qu’il me l’a demandé. Nous sommes devenus un couple. Pas basique mais pas extravaguant non plus. Il habite chez moi depuis peu, parce que c’est plus grand selon lui. Et plus près du boulot. Enfin lui et moi savons très bien qu’il a fait ça pour mon écran plasma sur lequel il joue aux jeux vidéo des heures durant. Je ne me plains pas, parce qu’il me rend bien ce temps après.

Comment expliquer ces derniers mois…Doutes, questionnements, stress, plaisir…je pourrai employer tous ces mots et bien d’autres encore pour tout décrire.

Mais la seule chose que je retiens vraiment c’est que j’ai trouvé mon partenaire et que je me suis laissé aller à devenir et surtout rester moi-même.

Maintenant si tu veux bien Baka-Green, je vais aller m’occuper de mon Nino…pour ton plus grand plaisir, ne ? ;)